Les plumes noires
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Les plumes noires

Forum de la session 2012/2013 de l'ACF des Plumes noires
 
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 deux enfants, sur un banc

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AuteurMessage
Dark Chouette
Hunger Games
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Dark Chouette


Messages : 271
Date d'inscription : 03/09/2012
Localisation : Quelque part entre les truffes et la bûche

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MessageSujet: deux enfants, sur un banc   deux enfants, sur un banc EmptyDim 6 Jan - 19:36

Ils sont deux, deux enfants, sur un banc.
C'est un banc en bois, vulgairement peint en blanc pour faire plus joli. mais le temps, le vent et la pluie auront eu raison de cet habillage, et il ne reste de la jolie couleur que quelques lambeaux de peintures, traces blanches d'une époque oubliée.
La petite fille doit avoir six ans, lui à peine plus. Elle a les yeux bruns, lui noirs. Si on s'était penché sur eux, on aurait vu que leurs deux mains, posés sur le banc, se touchent, s'effleurent à peine. Pourtant, ils ne se regardent pas. la petite fille pleure, le regard dans les nuages.
-Dis, Enzo. Est-ce que tu m'aimeras toujours ?
-Bien sûr.
-On se mariera, alors ?
-Oui, si tu veux.
Il y a un silence que les deux respectent. Le petit garçon tente de rapprocher sa main de celle de l'autre, qui se dégage.
-Dis, Enzo, pourquoi tu dois partir ?
-Ce sont mes parents qui veulent.
-Dis, Enzo... Est-ce que tu reviendras ?
Nouveau silence. Le petit garçon regarde le ciel à son tour. Il a l'air triste aussi.
-Je reviendrais, Victoire, parce que je t'aime grand comme ça.
-Quand est-ce que tu reviendras ?
-Je ne sais pas. Mes parents ont dit "dans longtemps".
-Mais dans longtemps, je serais grande, moi ! Comment tu me reconnaîtras ?
Le petit garçon a les yeux qui brillent. Il détourne les yeux pour pas qu'elle ne le voie pleurer. Ses mains sont crispées, ses doigts tendus. Il sort de sa poche un petit bijou.
-Qu'est-ce que c'est ?
-C'est de l'Ambre. C'est moi qui l'ai trouvé. Maman dit que c'est très précieux. Je te le donne. Quand je reviendrais, je te reconnaîtrais avec ça.
Il passe autour du cou de la petite fille la pierre orangée, dans laquelle est prise un minuscule papillon bleu, figé a jamais il y a bien longtemps de cela.
-Dis, Enzo. Quand est-ce que tu reviendras.
Le petit garçon se lève, s'en va. il ne répond pas. Peut-être parce qu'il ne veut pas répondre.
Si Victoire l'avait suivi, elle l'aurait vu pleurer.

*

Dix ans sont passés.
Victoire a grandi, plus vite qu'une fleur s'ouvre dans un jardin au printemps. Elle est en train de ranger son armoire. Alors qu'elle plie une petite robe, bien trop courte pour elle désormais, tombe une minuscule pierre. Elle se penche, la ramasse, la serre dans ses mains, puis contre son cœur.
Jamais elle n'a oublié.
Elle sort, les mains tremblantes. Le parc a été refait. Le banc, remplacé par une fontaine il y a bien des années. Assise sur le rebord, elle hésite.
Appellera, appellera pas ?
Il y a bien des années qu'Enzo s'est envolé.
Et s'il l'avait oubliée ?
Son doigt court sans aide sur les touches. Le numéro, elle le connaît par cœur. Elle l'a composé des millions de fois, sans oser.
Cette fois ci, son doigt ne s'arrête pas.
Une sonnerie, deux, trois. On décroche.
-Allô ?
Victoire ouvre la bouche, ne parvient pas à laisser s'échapper le moindre son. c'est lui. Il est si loin, et pourtant jamais il ne lui a semblé si proche.
-Allô ? Il y a quelqu'un ?
-Enzo... c'est.. c'est moi...
-Qui ça, "moi" ?
-Tu ne te souviens pas ?
-Me souvenir de quoi ?
-Il y a longtemps, Enzo, tu as déposé sur un banc un papillon bleu. Il t'attends toujours...
-Ah...
Silence. On entend la voix d'Enzo etouffée par la main qu'il a sans doute posé sur le téléphone.
-Trente secondes, Leïa, je reviens.
-Leïa ? Tu as une petite sœur Enzo ?
Le garçon ne répond pas.
-Ah, Victoire, c'est... cool. Je pensais pas que tu appellerais.
Le cœur de Victoire se serre. Sans doute connaît-elle déjà la fin de l'histoire... Sa voix se fait plus calme, plus lente, mais également plus faible.
-Dis, Enzo, quand est-ce que tu reviendras ?
-Victoire...
-Un papillon qui vole seul finira par se brûler les ailes, Enzo... Un papillon n'est pas fait pour voler seul...
-Tu sais, des papillons, là ou je vis, maintenant, il y en a plein, alors... on ne va pas arrêter de vivre...
La main de la jeune fille se crispe, elle raccroche. Ses larmes transparentes viennent fondre dans l'eau de la fontaine.
Où est passée l'innocence de notre enfance, où sont perdus les secrets d'autrefois ?
Le temps a passé
Les promesses, oubliées
Et ce vent, qui a autrefois porté nos confidences
Ne transporte plus que les larmes de ceux délaissés par l'enfance.

La main blanche s'ouvre comme une fleur, la pierre tombe, et sur le sol se brise.
Victoire reste immobile, statue sur le bord de cette fontaine. L'eau ruisselle sur ses cheveux, elle s'en moque.
Sur le chemin de terre les passants passent et l'ignore.
Lentement, elle se lève, et avec peine quitte le parc sans un regard en arrière.
Si elle s'était retournée, elle aurait vu un papillon, un papillon bleu prendre son envol...
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